Alimentation/dent, une relation d’amour et de haine

La relation entre l’alimentation et la dent semble être intime, mais parfois conflictuelle. L’aliment préside à la santé de la dent en fournissant les nutriments constitutifs de l’émail et de la dentine. Mais il contribue à la carie dentaire. Un déséquilibre dans les apports nutritionnels, engendre une mauvaise qualité des matrices organiques et minérales des dents et une altération de leurs défenses. De même, une alimentation “équilibrée” favorise un renouvellement des tissus de soutien des dents dans des bonnes conditions et une bonne cicatrisation gingivale.

Influences …
 Les études scientifiques décrivent les conséquences de certains manques et/ou excès alimentaires sur la santé des dents. Exemples: Un apport insuffisant en calcium et/ou phosphore détériore la qualité des cristaux d’hydroxyapatite qui forment l’émail dentaire. Une carence en protéines entraîne leurs malformations mais si l’alimentation est très riches en glucides la proportion des glycoprotéines augmente au détriment des cristaux résistants.
Il convient de distinguer les influences de certaines vitamines et minéraux: Une insuffisance en vitamine D perturbe l’évolution de l’émail, une carence en magnésium diminue la formation de l’os alvéolaire, une carence en vitamine A trouble la croissance de l’os et retarde la cicatrisation, une carence en vitamines B aggrave les gingivites et une carence en vitamines C altère la cicatrisation et la qualité du collagène composant essentiel de la gencive.
Toutes les carences en minéraux et vitamines retardent l’éruption dentaire.
Mais un apport suffisant en fluor augmente la résistance de l’émail.

Les aliments / bactéries génèrent des acides…

Les conditions alimentaires déterminent la sélection et le métabolisme des micro-organismes de la flore buccale (en particulier les streptocoques mutans, les lactobaciles et les actinomycès). Ces microbes utilisent les glucides alimentaires comme source d’énergie, ils vont synthétiser des substances collantes et favoriser la formation des acides. Or la diminution du pH salivaire provoque une déminéralisation de l’émail qui, par sa répétition, installe la carie.
Chaque aliment a un potentiel cariogène qui dépend de son contenu en glucides, du type du glucide et des nutriments qui l’accompagnent. La consistance et l’adhésivité de l’aliment sont des éléments qui augmentent le danger. On a montré qu’une alimentation molle favorise une plaque dentaire plus abondante, et si elle est collante, le temps du processus carieux se trouve prolongé.
La fréquence des ingestions de produits sucrés est plus importante que la quantité absorbée. Chaque prise alimentaire est source de baisse rapide du pH en dessous de 5,7 qui est un seuil critique de la déminéralisation. La baisse de Ph peut durer environ 20 minutes. Ainsi plus on multiplie les prises  alimentaires, plus longue sera la durée de l’attaque acide. 

Des conciliations à trouver…

Nous vivons dans un monde où on ne mange pas pour combler les besoins, mais pour le plaisir. Notre journée alimentaire est désorganisée. Le petit déjeuner est souvent léger, parfois absent alors qu’il doit couvrir au moins 25 % de nos besoins énergétiques. On cherche à tromper l’appétit par un grignotage incessant de produits industriels, au goût uniformisé et souvent sucré. Des habitudes alimentaires nocives s’installent, elles sont préjudiciables pour la santé en générale.
Comment concilier la santé avec certains plaisirs alimentaires ?

– En adoptant une habitude qui tend vers un petit déjeuner royal afin de bien démarrer la journée. C’est une clé qui va  régulariser les autres repas. 
– En choisissant mieux les aliments variés. Il existe des équilibres à trouver entre les envies et les besoins.
– En stabilisant un rythme des repas.
– En Sachant composer un goûter « prudent ». Le goûter est un moment idéal pour compléter l’apport calcique (lait et dérivés) et l’apport énergétique (céréales, fruits, …) et en évitant aliments qui collent.
– En terminant les repas, les en-cas par des aliments fibreux qui sont autonettoyants, et qui incitent à la mastication et à la salivation, afin d’activer le pouvoir tampon de la salive.
– Les sucreries peuvent être remplacées par des sandwichs au fromage, des fruits crus et des gâteaux faits maison ou autres desserts au lait. Les boissons sucrées par des fruits naturels et bien sûr par de l’eau.

Il n’est pas nécessaire de s’armer d’un logiciel de contrôle. L’éducation nutritionnelle est une affaire de bon sens. Les  mesures diététiques préventives sont faciles à concevoir mais peuvent être parfois difficiles à mettre en œuvre.

Article rédigé fin 1993, repris par Médilien, la revue de l’association des médecins Franco-Libanais